En fait, cet exposé aborde deux sujets totalement différents mais également intéressants.
Le premier est l'abus des résultats de corrélation que l'on observe dans un grand nombre d'études portant sur de très grand échantillons, notamment en Amérique du Nord. On surveille la santé d'un grand nombre de gens en observant toute une liste de facteurs : alimentation, exercice, prise de médicaments ou de toxines (notamment cigarettes), etc. On établit ensuite ces corrélations en utilisant une méthode appelée l'analyse régressive multiple -- c'est le terme employé par Nisbett, mais il se pourrait que sa critique vise plutôt l'analyse multivariable... mais je ne suis pas statisticienne... En tout cas, le problème est que ce genre d'analyse, si elle réussit à établir des corrélations, ne prouve pas qu'il y ait un effet réel d'un facteur sur un autre; par exemple, de la prise de vitamine E sur le cancer de la prostate dans l'exemple de Nisbett. C'est intéressant parce que c'est ce genre d'études qui a conduit à lier le cholestérol à la consommation de gras -- plutôt que de sucre -- ou les AVC à la prise d'hormones en général, alors que le risque ne touchait que les femmes qui commençaient à en prendre après la ménopause et non celles dont le taux d'hormones était plus ou moins maintenu grâce au médicament. Donc attention aux larges études multifactorielles!
Sur le deuxième sujet, qui devrait intéresser l'ensemble des enseignants et parents (au sens large) soit presque tout le monde, Nisbett confirme une expérience que j'avais eue avec mon fils, à savoir que dès qu'il ressentait une activité quelconque comme un travail -- ou détectait qu'elle avait un but pédagogique, ce qui revient au même puisque son principal travail était d'étudier --, il s'en désintéressait automatiquement. À titre de résultat secondaire, Nisbett souligne le biais qui peut être introduit par le fait d'utiliser des étudiants dans certaines études psychologique -- ce qui rejoint le thème de l'analyse régressive.
On pourrait ajouter au titre des précautions à prendre dans toutes les études (psycho- ou physio-logiques) une nouvelle que j'ai apprise par le biais d'une émission de télé (chaîne Savoir), soit la découverte que les systèmes de transmission des signaux de douleur au cerveau est radicalement différente chez les mammifères (en tout cas les souris) mâles et femelles. Dans un cas (les mâles), les cellules gliales participent au processus, dans l'autre (femelles), ce n'est pas le cas. Or, pour des raisons que j'ignore, la plupart des études seraient faites sur des mâles.
Une autre des questions que soulève cette dernière information est de savoir si une différence du même type joue un rôle dans le fonctionnement plus général du cerveau. Auquel cas, nous aurions une preuve supplémentaire que les cerveaux "typiquement" féminins et les cerveaux "typiquement" masculins ne fonctionnent pas exactement de la même façon avec, (on peut du moins le supposer même si ce n'est pas clair pour le rôle des cellules gliales), tout un spectre de possibilités entre ces deux pôles.
De quoi donner envie de lire les travaux de Nisbett ou tout simplement d'intégrer à sa réflexion ces nouvelle pistes...
The Crusade Against Multiple Regression Analysis | Edge.org
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