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+ Eqko : une perspective plus quotidienne sur les avatars de nos sociétés...

11 décembre 2006

Épigénétique

L'épigénétique...

Deux nouvelles sont tombées récemment concernant l'épigénétique. L'une concerne un médicament épigénétique, l'autre une prédisposition à l'obésité et (ou) au diabète. Cela prouve qu'à côté des reformulations qu'exige l'épigénétique au sein de la théorie de l'évolution et du rôle qu'elle peut jouer, notamment (comme je le soulignais dans mon livre) quant aux différences entre sexes, celle-ci fait d'ores et déjà partie de l'arsenal de la génétique et de la pharmacologie.

Mais qu'est-ce que l'épigénétique? En termes simples, l'épigénétique est l'étude de l'ensemble des facteurs qui gouvernent l'expression d'un gène (la génétique quant à elle s'intéressant à l'existence des gènes dans le génome de l'individu). Jusqu'à tout récemment, on pensait que les gènes étaient le seul vecteur de communication entre un individu et ses descendants. Ou bien l'individu héritait du gène ou non. Il apparaît maintenant qu'il peut hériter aussi d'un "code" déclenchant ou non l'activité de ce gène et même que le codage peut varier selon que le géniteur est un mâle ou une femelle -- ce qui étend considérablement le nombre de facteurs d'ordre génétique (au sens large, incluant l'épigénétique) qui peuvent influer sur les descendants. De plus, il est possible à un individu de transmettre une activation ou désactivation liées à son propre environnement et à sa propre histoire, ce qui a permis à certains de parler de "néo-lamarckisme" (mais Darwin lui-même acceptait l'idée que certains caractères acquis pouvaient être transmis et ni Darwin ni Lamarck ne disposaient des outils théoriques [biologie moléculaire; ADN] permettant de spécifier le mode de transmission). Quant aux modes de transcription et de transmission, ils seraient variés et reposeraient sur plusieurs mécanismes moléculaires.

Les scientifiques, on le voit, n'attendent pas que les discussions philosophiques soient closes pour se mettre au travail. On pourrait dire que (comme les mâles en général, et même si nombre de biologistes sont des femmes) les scientifiques s'intéressent plus à l'objet qu'au langage. Dira-t-on, inversement, que la philosophie -- et en particulier l'épistémologie -- n'est que jeux de mots? Question ouverte...

La seconde découverte, à savoir le rôle que pourrait jouer le poids de ses ancêtres pour l'obésité et (ou) la prédisposition au diabète d'un invidu, a aussi des conséquences du point de vue éthique. Serons-nous désormais responsables du poids de nos décendants? Après les conséquences de la génétique proprement dite -- que nous pouvons transmettre mais non modifier -- et celles de la gestation (syndrome d'alcoolisme prénatal, par exemple), sans parler du tabagisme passif, nos responsabilités explosent tandis que nous sommes de plus en plus conscients du fait que notre incapacité à mettre fin à nos addictions -- boulimie, cigarette et autres drogues -- ou à nos dispositions ou maladies mentales pourrait bien être elle-même génétique, épigénétique ou congénitale. La LIBERTÉ (majuscule) en prend un sacré coup. Ce n'est pas drôle, mais pas facile à contrer non plus...

8 décembre 2006

Déterminisme et feuilles de thé

Je sais, je sais, l'objectif d'un blog (même si personne ne le lit) n'est pas de développer une thèse complète mais plutôt de donner régulièrement un certain nombre d'informations, commentaires, etc. Le problème, c'est que la philosophie, fût-elle anthropologique comme celle que j'essaie de développer ici, ne se satisfait guère de morceaux d'arguments , que les arguments que l'on commence à développer s'avèrent parfois (souvent) faux, qu'il faut lire beaucoup pour comprendre un peu... Bref, comme les autres disciplines intellectuelles (comme la vie même?), la réflexion philosophique procède par à coups, par condensations successives, espacées d'intervalles plus ou moins longs de stase et de silence. Ce qui n'est pas dire que l'on ne pense à rien et je peux bien vous indiquer quelques-uns des sujets qui m'ont préoccupé au cours de cette période que j'évaluais subjectivement à deux semaines mais qui a bel et bien duré un mois.

Il y a d'abord eu quelques nouvelles, concernant notamment l'épigénétique, sur lesquelles j'aurai à revenir (quand j'aurai remis la main sur les références pertinentes)... Il y a aussi le sujet que j'avais abordé ("broché"...) dans mon dernier message (ou le précédent?) à savoir le débat entre Stephen Gould et Dennett sur la nature de la théorie de l'évolution. Bien que j'aie eu tendance jusqu'à présent à manifester une certaine aversion pour le discours de Gould, je commence à me demander si l'accent qu'il met sur l'histoire et la sélection de groupe n'a pas, finalement, une certaine importance. Du côté de Dennett dont je viens de lire le livre Sweet Dreams, Philosophical Obstacles to a Science of Consciousness, je dois dire que je n'ai pas trouvé les réponses que je cherchais et que j'ai eu du mal à "entrer" dans sa formulation typiquement analytique des (faux?) problèmes de la philosophie de l'esprit. Au point que je serais tentée de lui appliquer la splendide citation de James D. McCawley qu'il a placée en exergue de son livre Elbow Room (Les coudées franches? -- je ne sais pas si c'est traduit) sur le libre arbitre :

"Le philosophe, c'est celui qui présente un exposé sur le paradoxe du pendu dans un symposium sur la peine de mort."

Une réflexion qui souligne bien le problème de l'inutilité de certaines procédures et "expériences de pensée" utilisées en philosophie analytique et ailleurs, un problème également souligné par Marc Imbeault dans une récente conférence (La noblesse des fins) sur la torture.

Mais si je parle de Elbow Room, c'est qu'en effet la question du déterminisme est une question centrale pour la théorie de l'évolution et plus largement l'anthropologie et le matérialisme en général. Mais ce n'est évidemment pas un sujet que l'on peut traiter en un tournemain...

À suivre donc...