Demain n’est pas toujours demain, ce peut-être après-demain et parfois même la semaine prochaine… mais ceux qui ont déjà lu ce blog le savent!
Hier, avant-hier ou la semaine dernière, j’ai avancé deux thèmes sur lesquels je voulais revenir, l’autonomie et la discrimination dite « positive ». Commençons par le premier.
Je commence à être exaspérée d’entendre que les femmes ont gagné leur « autonomie » dès lors qu’elles disposent d’une certaines indépendance financière. On peut être indépendant financièrement sans être « autonome » (comme de nombreux hommes… et femmes!) et on peut être autonome sans être indépendant financièrement. C’est vrai dans le couple, dans la famille, dans l’entreprise, etc. Et les familles sont souvent aussi (ce qu’on oublie un peu vite) de petites entreprises et (ou) des centres d’entraide ou de soins. Pour bien voir ce que je veux dire, il suffit d’envisager les situations suivantes : les deux conjoints travaillent ensemble au sein d’une petite entreprise (paysanne ou autre); leur est-il possible d’être autonomes? indépendants financièrement? Une femme ou un homme reste à la maison pour s’occuper des enfants : est-il-elle autonome? Un couple s’occupe de ses parents âgés, deux ami(e)s fondent une entreprise, adoptent un enfant, achètent en commun un condo ou une maison… Les situations abondent où il me semble que l’on peut être (relativement) autonome sans être indépendant financièrement.
Mais il y a plus. Je me demande en effet si cette notion d’autonomie elle-même n’est pas pernicieuse. Je n’ai personnellement jamais rencontré de personne parfaitement autonome, seulement des gens qui – volontairement ou non – « oublient » qu’on les a aidés et qu’on les aide encore de diverses façons. Quant à l’indépendance financière, il me semble que la crise des surprimes a bien illustré ce qui quand on y réfléchit est une évidence : aucun d’entre nous n’est totalement indépendant financièrement. Que l’État dans lequel nous vivons, notre fonds de pension, notre entreprise ou notre secteur économique s’effondre et notre indépendance vole aussitôt en éclat. Inutile de donner des exemples, il suffit de lire les journaux…
Il me semble que plutôt que d’attacher autant d’importance à une autonomie factice, il est plus profitable de se préoccuper de la qualité de nos relations, de ce qu’elles nous apportent et aussi de ce que nous pouvons faire pour les améliorer. Le problème n’étant pas ici de nature morale mais de l’ordre des faits : que nous le voulions ou non, nous dépendons les uns des autres et ne pas en prendre conscience ne protège nullement des conséquences. Pour revenir sur la question spécifique des relations entre hommes et femmes, ce problème se conjugue avec ce que l’on pourrait appeler refoulement (ou forclusion) du travail féminin traditionnel. Même si les féministes – du moins certaines – ont en leur temps insisté sur le fait que les femmes « travaillaient » même si elles n’étaient pas salariées, tout se passe aujourd’hui comme si ce travail était devenu invisible, à tel titre que les deux conjoints sont censés l’assumer comme « en passant », en plus de leur journées de travail. Je sais bien que nous disposons aujourd’hui de toutes sortes de gadgets électroniques censés* alléger le travail ménager mais il y a lieu de se demander si les contraintes modernes (paperasse, rendez-vous, horaires, éloignement, etc.) n’ont pas considérablement grugé ce qui est ainsi gagné. Mais surtout, les femmes étaient dans le passé les spécialistes des relations, que ce soit avec la famille élargie, les amis, les amis des enfants, les relations de travail, ou autres. Il me semble donc que cette notion d’autonomie fait l’impasse sur tout un volet de la vie familiale.
Bien entendu, il faudrait préciser cette notion de « spécialiste des relations » et aussi se demander si la confusion entre travail et travail rémunéré n’a pas une portée plus vaste, et ne tend pas à dévaloriser de nombreux secteurs de l’activité humaine parmi les plus « humanisants ». Mais ce sera pour une autre fois (et je ne dis pas demain!).
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